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Un petit point d'histoire du château de Maintenon.
Ce château remonte au Moyen-Age,
comme en témoigne sa tour carrée du XIIème siècle.
Ce château fût offert par Louis XIV à Madame de Maintenon en 1674 laquelle était alors gouvernante des batards de Madame de Montespan.
Cette dernière y trouva refuge à plusieurs reprises et y accoucha de Mademoiselle de Blois et du Comte de Toulouse en 1677 et 1678.
Diane de Poitiers, Madame de Maintenon, Sully, Henri IV, Saint-Simon, Proust, Péguy, Zola, Vlaminck, Jean Moulin, Franz Stock et beaucoup d'autres
ont marqué de leur présence cette destination.
Aux portes de la riche Beauce et du Thimerais, au creux de la charmante vallée de l'Eure, le château se situe entre Chartres, Rambouillet et Ablis.
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Hors
le cercle famillial et jusqu'à Madame de MAINTENON, personne ne s'était soucié de la formation à la tapisserie au point
et à fortiori à ce qu'elle baptisera du nom de "Petit Point"*.
C'est de son désir de donner une éducation raffinée aux jeunes filles nobles mais orphelines que naîtra, en sa maison d'éducation de
saint Louis à saint Cyr, la première "leçon de Petit Point". Ce Petit point de tapisserie a gardé inscrit dans son nom le lieu de sa naissance.
On l'appelle depuis lors le Point de saint Cyr.
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* Point de tapisserie à l'aiguille souvent confondu avec le demi-point de croix ou avec le quart de point mais qui s'en distingue par la méthode de réalisation et surtout par l'envers qui apparaît comme un cannage. Ce point a des qualités remarquables tels sa résistance et son aspect finis qui en font le point de tapisserie à l'aiguille de prédilection pour les dessus de sièges. A droite un fauteuil visible au château de Maintenon et réalisé au Petit Point.
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Le Petit Point dit Point de saint Cyr
Jusqu'alors on utilisait différent point tels : "faicts au gros point sur canevaz", "faicts sur point croisé d'or, d'argent et de soye de nuance ..."
L'inventaire des joyaux de la Couronne, dressé au château de Vincennes en 1418 signale "une petite bourse à poins". En 1480,
la veuve du roi René fait exécuter à Jean Guillebert, son menuisier, un métier à tapisserie; puis en 1483, dans l'inventaire
de Charlotte de Savoie, veuve de Louis XI, est mentionné un métier à tapisserie au point. Catherine de Médicis, au dire de Brantôme,
"passait fort son tems, les après-dinées à besoigner après ses ouvrages de soye où elle estoit tant parfaite qu'il
estoit possible". (Notons que c'est en son honneur que DMC® à créé la gamme prestigieuse de laines à tapisserie de
ce nom). Madame de Maintenon intégra ce savoir faire et tout ces points de tapisserie dans ses leçons.
Mais le plus beau de tous ces points, le plus solide, le plus fin, Le PETIT POINT était enseigné en fin d'études.
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Françoise d'Aubigné, veuve du poète Scarron et Marquise de Maintenon,
devînt propriétaire du domaine en 1674. Elle a agrandi et embelli le château, avant de devenir en 1684, l'épouse secrète de Louis XIV. Le poète Racine a écrit à Maintenon les tragédies "Esther" et "Athalie". Le Nôtre a dessiné le parc et les parterres, et creusé le grand canal qui passe sous l'aquaduc construit par Vauban et La Hire.
Cet édifice inachevé devait amener les eaux de l'Eure à Versailles. Les travaux commencés en 1684 ont employé 30 000 personnes et ont été abandonnés en 1710.
Dans une lettre adressée le 5 février 1675 à Mme de Coulanges, Mme Maintenon écrivait: "J'ai été deux jours à Maintenon qui m'ont paru un moment; mon cœur y est attaché. C'est une assez belle maison. un peu trop grande pour le train que j'y destine. Elle a de fort beaux droits, des bois…"
Au retour d'un voyage à Maintenon, le Roi, en lui, parlant, la nomma devant tout le monde. "Madame de Maintenon".
"Il est vrai," écrivait-elle le 6 février 1675 à l'abbé Gobelin, "que le Roi m'a nommée Madame de Maintenon, et que j'ai eu I'imbécilité d'en rougir ... , je n'aurai cependant de plus grande complaisance pour lui que celle de porter le nom d'une terre qu'il m'a donnée".
C'est en 1673, lors de la légitimation des enfants du Roi que Françoise quitta cette résidence pour les splendeurs du palais de Versailles.
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C'est le 24 novembre 1635 que naquit Françoise d'Aubigné dans la conciergerie de la prison de Niort. Son père, Constant d'Aubigné seigneur d'Aubigny et de Surimeau était le fils du célèbre poète calviniste Agrippa d'Aubigné. Emprisonné pour s'être essayé à la fabrication de fausses monnaies, sa femme Jeanne de Cardilhac, restée à ses côtés, mettait au monde la petite fille qui devait un jour devenir l'épouse morganatique du Roi Soleil.
Enlevée de ses parents, Madame de Neuillant qui l'avait recueillit décida de marier Françoise. Le choix se porta sur un certain Paul Scarron. Cet homme né en 1610 d'un parlementaire Parisien et d'une fille de magistrat, était un poète pittoresque et de grande renommée. Hélas, c'était ses seules qualités car il était non seulement trop vieux pour la jeune fille (25 ans d'écart) mais il était aussi atteint d'une terrible forme de rhumatisme déformant qui attaque les vertèbres. Malgré son handicap, Scarron était très apprécié et « tenait salon » chez lui. On y retrouvait d'illustres personnes tels des hommes de lettre comme Benserade ou Marigny, des seigneurs comme Gabriel de Rochechouart Duc de Mortemar, prince de Tonnay-Charente, premier gentilhomme de la chambre du roi, le marquis de Villarceaux, grand Louvetier de Louis XIV; on y retrouvait aussi de grandes dames comme la marquise de Sévigné, Madame de La Fayette ou Ninon de Lanclos (Anne, ou Ninon de Lenclos, née le 10 novembre 1620, mourut le 17 octobre 1705, à quatre-vingt-cinq ans. Elle resta tout au long de la vie de madame de Maintenon, sa meilleur amie) . Le salon ne désemplissait pas et de nombreux hommes étaient attirés par les beaux yeux de la maîtresse de maison, notamment les Maréchaux d'Aumont et d'Albret. L'état de Scarron empira vers 1660. Il rendit son dernier soupir la même année. Laissant une jeune veuve de 25 ans, endettée et ne pouvant régler toute les créances, Madame Scarron se retira au couvent des Hospitalières.
Par la grâce de ses amis et admirateurs elle obtint une pension de la reine mère Anne d'Autriche. Ce qui lui permit de quitter le couvent et de s'installer dans un logement situé dans le Marais à Paris. C'est lors d'une soirée chez les d'Albret qu'elle rencontra pour la première fois Madame de Montespan à laquelle elle décida de lier son destin. Sa véritable relation avec le roi débute en 1675, d'ailleurs Louis XIV écrit dans son journal "Il y a quelques jours, un gentilhomme de gris vêtu, peut-être un prince errant incognito entreprit durant la nuit une nymphe égarée dans le parc de Saint-Germain. Il savoit le nom de cette nymphe & qu'elle étoit belle, bonne, pleine d'esprit mais sage. La nymphe cependant se laissa faire et ne lui refusa aucune faveur. Cette nymphe ressemblait à s'y méprendre à Mme Sc. ; et je crois deviner qui étoit le prince vêtu de gris. Ce prince est comme moi, il déteste les femmes légères, il honnit les prudes, il aime les sages."
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Rien n'est moins raisonnable que de vouloir que les enfants le soient.
sic Madame de Maintenon
L’école de Saint-Cyr fut sa grande consolation, le plus bel ouvrage de sa vie. Elle put réaliser, grâce à la bienveillance de Louis XIV son désir d'accueillir et d'éduquer des jeunes filles pauvres de la noblesse, pour les former au mariage et à leur vie prochaine dans le monde. Rien n’était alors plus négligé dans le royaume que l’éducation des jeunes filles.
Saint Cyr ouvrit ses portes en juillet 1686. Plus de 3100 jeunes filles seront élevées aux frais de l’Etat. Les pensionnaires étaient admises entre 7 et 10 ans ; elles en sortaient à l’âge de 20 ans avec une dot de 3000 livres.
En 1568 Albert de Gondi, Conseiller de la Reine Catherine de Médicis acquit la ville de Noisy-le-Roi et ses environs. Il décida de construire un château à la lisière de la forêt.
Durant le siècle suivant, avec les visites des membres illustres de la famille Royale, le village et son château devinrent l'antichambre de la monarchie Française. En 1686 Louis XIV mis à la disposition de Madame de Maintenon le château pour en faire un internat pour les filles pauvres de la noblesse. La Maison Royale pour l'éducation des jeunes filles était née. Cent élèves y vécurent. Quelques années plus tard, après Noisy-le-Roi, l'école fut transférée dans la ville proche de Saint Cyr.
Sur cette institution Paul Verlaine écrivait: "Quand Maintenon jetait sur la France ravie L'ombre douce et la paix de ses coiffes de lin ..."
Saint Cyr: Une colonie de chrétiens établie à proximité du lieu où fut martyrisé le jeune Cyr, sous Dioclétien, est à l'origine d'une agglomération qui prit le nom du saint.
La première représentation d'Esther, tragédie composée par Racine à la demande de madame de Maintenon, eut lieu à Saint-Cyr en 1689 en présence de Louis XIV. Les représentations sont privées, réservées à un petit nombre d'élus dont Madame de Sévigné. Voici ce que Madame de La Fayette écrit dans ses mémoires: "Mme de Maintenon pour divertir ses petites filles et le roi, fit faire une comédie par Racine, le meilleur poète du temps, que l’on a tiré de sa poésie où il était inimitable, pour en faire, à son malheur et celui de ceux qui ont le goût du théâtre, un historien bien imitable..."
Une citation de Madame de Maintenon elle même mérite aussi d'être mentionnée; elle avait pu dire en venant pour la première fois à saint Cyr:"Ce qui me fait plaisir, c'est que je vois ici ma retraite et mon tombeau." Enfin, sur l'épitaphe composée par l'Abbé Vertot on pouvait lire"Son corps est resté dans cette maison, dont elle avait procuré l'établissement. Elle a laissé à l'Univers l'exemple de ses vertus."
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Le Petit Point de saint Cyr.
C'est un point de tapisserie complexe et simple à la fois comme l'est la psychologie féminine. Un point qui sait parfaitement épouser
la trame du canevas dont il sait que sans lui il ne serait pas. Un point qui aime à se croiser avec ce qui le soutien et l'enlacer de ses bras colorés.
Un petit point qui danse aux petits pas de ces bourrées ternaires et menuets du XVIIem siècle en usage dans la bonne société de
cette époque et qui inspirèrent Jean Batiste Lully et Jean-Philippe Rameau :
¶ I un petit point de biais par-devant puis
¶ II deux pas de coté en pivotant légèrement,
¶ III un petit point de biais par-devant,
¶ I deux pas en arrière en se retournant,
¶ II un petit point de biais en avant et
¶ III deux pas en arrière en pivotant,
¶ I un petit point de biais par-devant puis
¶ II deux pas de l'autre coté et à nouveau
¶ III un petit point de coté puis on recommence,
¶ I deux pas de l'autre coté,
¶ ..) couvrir la chaîne en descendant et...
¶ ..) la trame en montant!
Un point qui monte puis redescends et toujours d'un pas fort entrainant.
Un point dont la partie visible vous enchante par les motifs admirables qui y sont représentés et dont la partie invisible semble être une forteresse, tant et si bien qu'on se demande comment de tant de rigueurs cachées puissent être nées tant de sublimes fantaisies. Un point de biais qui ne déforme pas ce qu'il unit, rendant carré en son fini ce qu'il avait trouvé carré en son principe. Un point qui bien qu'utilisant les fibres les plus douces comme la laine ou les plus fragiles comme la soie créé une oeuvre qui résiste à l'usure du temps.
Le point de saint Cyr a aussi gardé de ses origines le classicisme de son siècle. C'est le point de tapisserie Royal par "excellence". Dès cette époque, la tapisserie au point de saint Cyr devient un fait de société et envahit les boudoirs et les salons. On le retrouve sur une tapisserie de Madame de Mailly que Louis XV lacéra d'un coup de couteau, plus tard, sur les garnitures de fauteuils réalisées par Marie Antoinette pour Compiègne. Exécutée à la cour ou dans la bourgeoisie de province, la tapisserie au point de saint Cyr est entrée dans l'histoire. Les grands de ce monde vont continuer la tradition en brodant des tapisseries au Petit Point pour leur mobilier, la duchesse de Berry pour son château de Rosny et le général Cambronne pour occuper ses vieux jours...
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Louées soient les femmes. elles tressent et tissent des roses célestes pour une vie terrestre. (Schiller dans "Si les femmes")
Le petit point est leur art! Depuis l'Antiquité et dans toutes les classes de la société cet art est entrenu par les plus artistes d'entre elles. Dès l'époque des pharaons l'art de la tapisserie au point est apparu avec les premiers travaux à l'aiguille. On y brodait déjà les plis des vêtements des pharaons. Des fouilles en crimée, sur la presqu'île de kertsch, ont porté au jour des tapisseries au point en fils et en plaquettes d'or d'une finesse qui témoignent de la qualité de l'art grec de l'ornement textile. A l'ère chrétienne on trouve une tapisserie brodées à l'aiguille au palais de Khosrô-II (590-628), roi des Sassanides. Cette oeuvre nous est connue par l'inventaire du pillage de ce palais par l'empereur byzantin Héraclius. On dit que cette tapisserie fut brodée par la Princesse Chirine, "La Princesse d'Argile", une chrétienne de Byzance qu'avait épousée Khosrô-II et qui, pour la remercier de cette oeuvre merveilleuse lui fit construire un magnifique palais, le Kasr-e-Chirin. Mais quelle autre preuve d'attachement que cette tapisserie réalisée au point de bayeux au XI em siècle par la Reine Mathilde et retraçant les exploits de son Roi Guillaume?
Le point de saint Cyr, comme imprégné de l'esprit de l'école où
il est né, est une leçon de modestie. Il ne s'impose pas par une extravagante apparence. On croirait à le voir n'avoir à faire qu'à un simple demi point de croix. C'est timidement qu'il se présente à nous comme doivent le faire les jeunes filles de bonne éducation. Ce n'est que petit à petit et après de longs préliminaires que ce petit point révèle non seulement sa face cachée mais aussi sa complexité qui, notons le, ne doit pas être confondu ici avec difficulté.
Madame de Maintenon devait bien savoir tout l'intérêt que ses jeunes filles pouvaient retirer de l'apprentissage de ce point de tapisserie. Tout dans ce simple point rencontre les qualités féminines naturelles. Il est d'abord un far qui embellit ce qu'il découvre. Il semble complexe au premier abord mais par une attention et considération soutenue il se laisse néanmoins facilement maîtriser. Sa structure est solide et résiste aux fatigues de la vie mondaine et familiale. La patience qui est nécessaire pour sa réalisation et son accomplissement est comme le reflet de celle nécessaire à l'éducation des enfants. Enfin dans toutes ses apparitions qu'elles soient de prestige ou domestique sa présence ne peut jamais être ignorée.
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